France Ports Accueil N°87 Janvier/Février/Mars 2014

 «  Les gens de mer ont changé, peut- être pas encore tous les regards qu’on leur porte «. C’est ce que disent, à Dunkerque, Elizabeth Gueuret, et Richard Baron,  qui viennent de réaliser le cinquième et dernier ouvrage, «  Escale « ,  de la Collection Long Cours, proposant un double regard sur les marins : celui de la sociologue et celui du photographe. Ce dernier a choisi de montrer le temps de l’escale ,, temps qui ne dépasse pas souvent quelques heures et est devenu un temps de travail intense . Comme l’écrit Elizabeth Gueuret, les souvenirs des marins qui ont posé leur sac à terre à la fin des années 80 glissent progressivement dans un imaginaire collectif. Le jugement qu’ils peuvent porter sur l’évolution de l’activité maritime ne peut se démarquer d’une comparaison nostalgique avec ce qu’ils ont vécu.

Par contre, parmi  ceux qui peuvent voir la situation avec des yeux neufs, il y a les bénévoles et les volontaires du service civique engagés dans nos foyers pour des contrats de six mois. Peu de ces derniers viennent du milieu maritime  mais étant pratiquement tous les jours en contact avec les marins,  ils découvrent très rapidement, au travers des services rendus, un univers de vie avec ses problèmes. Conduire le marin — au club pour qu’il puisse communiquer avec sa famille par ordinateur équipé de web cam, – à la Poste pour qu’il puisse envoyer de l’argent à sa famille par Western Union, – au supermarché voisin pour qu’il puisse faire quelques emplettes — tout cela fait partie des tâches du volontaire service civique. Mais quand ce dernier lira des sentiments divers sur le visage du marin face à la web cam, quand il verra la modicité des sommes envoyées aux familles, parfois seulement 100€, quand il constatera que les sacs rapportés du supermarché sont souvent pleins de produits alimentaires, il réalisera facilement ce que peut éprouver un marin éloigné des siens pendant assez souvent  neuf mois, il en déduira que les salaires sont assez bas, et il tirera la conclusion qu’il y a parfois des problèmes alimentaires. Cela ne peut que l’inciter davantage à aider le marin pendant son escale au port et je suis certain que ces volontaires contribueront,  pendant et après leur contrat, à faire changer le regard porté sur ceux qu’ils ont appris à connaitre et à apprécier.
Angel Llorente

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