Rochefort fête la mise à flot de la réplique de l’Hermione de La Fayette

ROCHEFORT (Charente-maritime) – Rochefort a célébré en grande pompe vendredi la mise à flot dans la Charente de la réplique de l’Hermione, la frégate sur laquelle La Fayette rallia en 1780 les Etats-Unis, étape décisive de ce défi technique avant la traversée de l’Atlantique en 2015.

C’est peu après 19H40, à marée haute, que la coque rutilante, peinte de bleu, jaune et rouge vifs, a quitté sa cale de construction pour sa première rencontre avec les eaux vives du fleuve sous les applaudissement de quelque 65.000 personnes massées sur les rives de la Charente.

Le vent est fort, ce ne sera pas simple pour ceux qui vont effectuer la manoeuvre“, avait prévenu Jean-François Fountaine, vice-président de l’association Hermione-La Fayette, à l’origine de ce pari fou : reconstruire à l’identique le trois-mâts sur lequel Gilbert du Motier (1757-1834), marquis de La Fayette, avait embarqué le 21 mars 1780 pour aller annoncer aux indépendantistes américains le soutien officiel de la France.

C’est la manoeuvre du bateau-porte, construit pour l’occasion et utilisé pour la première fois à Rochefort depuis la Seconde guerre mondiale, qui a été la plus ardue, avant finalement d’ouvrir le passage à la majestueuse coque de l’Hermione sur laquelle avaient pris place musiciens, danseurs et comédiens en costumes du 18e siècle.

Tirée par deux remorqueurs, la frégate – qui n’a encore ni mât, ni voile, ni gréement – est sortie sans encombres de l’étroit chenal de la forme de radoub qui a abrité son chantier depuis 1997. Après avoir vogué sur la Charente, elle devrait passer la nuit devant l’ancienne corderie royale.

Saluée par 21 coups de canons, notamment tirés par le ministre des Transports et de l’Economie maritime, Frédéric Cuvillier, l’Hermione avait été auparavant baptisée par une pluie de feuilles de chêne – clin d’oeil au cérémonial des lancements de navires de la Marine royale – alors que deux enfants, une Française et un Américain, emportés sur des trapèzes déployaient des drapeaux des deux pays.

C’est une double renaissance : celle d’un navire que la France avait oublié et celle d’un arsenal qui avait été détruit en 1944“, s’était réjoui peu avant Benedict Donnelly, le président de l’association Hermione-La Fayette.

Après ce premier test de navigation, la frégate – longue de 65 mètres et large de 11 mètres – regagnera dès samedi un autre bassin de construction navale mieux adapté à la poursuite du chantier.

Avant la cérémonie, une cinquantaine de bateaux de tradition étaient venus saluer l’Hermione, dont les 400.000 pièces de bois et de métal ont été reproduites et assemblées selon les savoir-faire traditionnels.

D’un coût de 23 millions d’euros – le double du budget initial – ce chantier titanesque a mobilisé des dizaines d’artisans venus de France, mais aussi d’Angleterre, d’Allemagne, d’Espagne, de Suède, qui ont travaillé sous les yeux de quelque 3,5 millions de visiteurs.

Le meilleur symbole pour redonner vie au patrimoine de Rochefort“, ville-arsenal créée sous Louis XIV, “c’était de construire un navire“, explique M. Donnelly. “On en a rêvé, on l’a fait !“, s’est-il félicité.

Saluant une “belle histoire d’ambition et de rassemblement“, l’académicien Erik Orsenna, président du Centre international de la mer à Rochefort, s’est souvenu quant à lui de la façon dont l’idée de ce projet fou avait germé en 1993 devant les formes de radoub, vides de tout bateau et mangées par la végétation.

Prochain défi de taille pour la frégate, la traversée jusqu’à Boston à l’horizon 2015 avec un double équipage, français et américain. C’est dans cette ville du nord-est des Etats-Unis que La Fayette, âgé d’à peine 23 ans, avait débarqué pour combattre aux côtés des insurgés américains contre les troupes britanniques, scellant son destin de héros de l’Indépendance américaine.

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image: afp.com/Xavier Leoty
Source: http://www.lexpress.fr

Photos par Thierry WARION (Pilote Maritime)